Ivon Lorint, on walon scrijheu. Yvon Laurent, écrivain wallon. |
Dresséye:
Li lumiére discôpéye
Å triviè du fouyâdje
Di sacantès pinséyes
A ralumè les âdjes.
(La lumière découpée / à travers le feuillage / de quelques pensées / a rallumé les souvenirs)
An chuwant les nuwâdjes,
Dj' é rouvyî les mwés djous,
Et les pirès orâdjes
Ont stî spåmès avou.
(En suivant les nuages / j'oubliai les jours néfastes / et les pires orages / ont été balayés (litt. rincés) en même temps)
L' grand solia astårdji
Sul pas d' uch des estès
A rsuwè a plêji
Les pwènes pa tos costès
(Le grand soleil qui s'attarde / sur le pas de la porte des étés / a séché à plaisir / les peines de tous côtés)
C' e-st å pî du vî meur
K' on s' astoke in momint
Pou ramantchî l' boneûr
D' in côp d' keûr plin les mwins.
(C'est au pied du vieux mur / qu'on s'appuie un moment / pour rafistoler le bonheur / d'un coup de cœur à pleines mains)
Les lumiéres du passè
Ont ranimè les âdjes;
Dji m' î é ristchåfè,
Li timp di rprinde corâdje.
(Les lumières du passé / ont ranimé les souvenirs / je m'y suis réchauffé / le temps de reprendre courage)
Ci rima ci a sti eplaidyi eto din: El Bourdon 514 (mårs 1999) eyet qué walon po dmwin ?, éd. quorum, 1999.
- Bone anéye, bone santè !
- Et vos parèyeumint !
- Cloyouz l' uch; i fêt frèd
Po dire vosse complimint !
Bone anéye a matante,
Et ossi a mononke;
Dins nosse potche, ene pîce tchante.
(Li) djournéye ni sra nén longue.
Dispétchons nous, m' vayant.
Dins li stûve, li bwès pète;
Ça sint bon l' novèlan
Padzeu l' moncia d' galètes.
Les nez son-st adjalès
Et co ôte tchôze avou.
Fåreut rintrer, valet,
Prinde in vêre avou nous.
Li cassiss då pârin
A parfumè l' gozî.
Mârène a mis s' vantrin
Des dîmègnes pou l' chervi.
L' pwin d' èpices da Mariye,
Aclapè dins les dints
A co du yesse mawyi;
Ça n' nè finicheut nin.
Les nîves, les plouves, les vints
Ont sayî d' foute å rî
Imâdjes èt complimints
Ki n' volint nin mori.
Mi, dj' elz é vlu wårder
Dins l' guèrnî des sovnances
Eyuski dj' é mechnè
Des plêjis plin ene banse.
Mes deuts sont distinkiès su vosse doûs cwâr, guitâre,
Et m' tchant si sint soutnu å rite des longs acwârds
Li rfrin est mia k' ayîr;
Al pwartèye, mètons l' clè.
Pou rmonter tos nos dzîrs,
Les soupirs s' ont stramè.
Echène å crèchèndo,
Li pwint d' orke nos ratind
Dins li scret du tèmpo
Cand l' mèlodiye prind s' timp.
Fugitive evasion !
L' êr asteure rapåjiye
Léye l' imadjinåcion
A l' èscô du plêji.
Yvon Laurent, divin: Di toutes les couleûrs, ramechnéye du scrîjadjes a walon, avou l'accint di Romèdène, arondichmint di Flipvile.
Cassette disponible chez l' auteur.Yvon Laurent, rue de Godincourt, 20/1, 6750 Musson, Waloneye (Gåme), Beldjike.
Si simpes.
Choûter l' tchant du cok come i chone,
D' achîd a l' coupète du vî meur,
Cand l' nouvia djoû rimet s' marone
Pou rawèyî les tchôdès eûres.
Choûter les pouyes qui codôsnut
Padrî l' grand courti du vijin
Cand l' solia du mwè d' aousse lût
Ås prèmîrès eûres då matin ;
Choûter bate li keûr du vilâdje
Cand tout ravike å plin d' ène fièsse ;
Choûter tout ça, c' est l' vraiy lingadje
Des djins si simpes... min nin si biesses !
divin: Calindrî walon 1999.
Poqwè scrîre è walon èt dispû quand ?
Li preumiére pâdje (introduction) dins "Di toutes les couleurs" respond an pårtiye al question
Dj' î rajoute çouci. Dins s' vikériye, il arive toudi in momint qui vos fét rvèni aviè l' vî timp. Li cia qui vz a fé conèche les djins autoû d' vous. Adon, on rpinse a sn èfance, a si djonnesse; et les mots rvennut dins l' tiesse avou les imâdjes dou passè.
Tanawète, 2 côps su l' anéye, dji rtoûne a Romèdène èyu ç' qui dj' ai vnu au monde. C' est putète bén çoula qu' a ranimè l' flame qui dwârmeut dispû si lontimp? Min dj' avouwe qui pârler l' walon a divnu toudi pu râre d' ene anéye a l' ôte, jqu' a n' pus l' ètinde du tout...
Ossi, in bia djoû del ritraite, i m' a pris ene zine di rtrover mes racènes dins les scrîjâdjes. Dj' avouwe co qui c' est pus auji di l' cåzer et l' lîre qui d' el sicrîre. C' est poqwè dji m' aureu bén contintè d' ene cassete qui n' date qui di quéques mwès (èt èco avou des moyins limitès !). Paçqui, pou-z ariver, gn a co du pwin su l' plantche et "des tchmîjes a suwer" sapinse Pîret.
Vla insi l' afaire!
Yvon Lorint, lète a Lucyn Mahin,do 12 di djulète 1998.
L' accint d' après Romèdène
Accent classifié ouest-wallon, mais très proche du centre-wallon; nén, bén, rén etc. se prononcent dénasalisés (né, bé, ré); les autres éléments de l'ouest-wallon sont: phonème ou / o parfois sous forme ou (pou, nous), 1e pers. du pl. ind. prés. en -ons (despêtchons, mètons), suffixe -âdje.
Retrouver ses racines
C'est fait : une page importante de la vie vient d'être tournée ! Les heures de la retraite, que l'on dit toujours " bien gagnée ", se profilent dans un arc-en-ciel prometteur. Les multiples soucis de la profession sont au placard et les souhaits d'une nouvelle étape paisible et remplie d'activités librement choisies s'étalent sur fond de plaisirs, de don de soi, de joies personnelles à partager avec ses proches et bien d'autres encore.
C'est fait : on a décroché ! Le temps est, croit-on, maîtrisé ; les minutes, les secondes sont à goûter comme un vieux vin, lentement, avec abandon, dans la délectation d'une infinie jouissance. Et l'on se plaît à faire redéfiler les moments perdus. Jeunesse et enfance refont surface au détour d'un voyage, d'une reprise d'atmosphère au village natal. On se surprend à regretter la disparition de telle figure familière tout en gardant toujours au fond du coeur l'image des êtres les plus chers qui s'en sont allés à jamais parce que c'était écrit, inéluctablement ! Dans ces instants d'évasion, des tranches de vie dessinent leurs contours de plus en plus précis : les visages s'affirment dans l'album de notre mémoire ; les voix, à leur tour semblent résonner à nos oreilles : les intonations font résurgence parmi des bribes de phrases, des expressions savoureuses... On s'étonne soi-même de les répéter à voix haute dans le contexte du quotidien et, bien sûr, dans sa langue que l'on peut qualifier de " maternelle " : le wallon.
Il faut bien avouer qu'un brin de nostalgie du passé se mêle aux évocations passagères qui se multiplient au fil des jours. Et : brusquement, c'est l'évidence en pleine lumière : il faut reprendre contact, il faut retrouver... ses racines !
Du parlé a l'écrit.
qui n'a vécu le phénomène humain qui vient d'être évoqué brièvement ci-dessus ? Personne, à mon sens, n'échappe tôt ou tard à cette réflexion vitale.
Aussi, comme beaucoup d'autres, j'ai donc voulu retourner sur les traces de ce passé wallon. L'empreinte d'une langue bien vivante et les attaches profondes aux lieux et aux groupes ne font qu'un. Bien sûr, l'arbre généalogique, délaissé pour cause professionnelle, a retrouve sa raison de recherches, et de branche en branche, les découvertes se sont précisées. L'envie pressante de retrouvailles m'a conduit chez tel cousin qui manie le wallon avec aisance, chez tel ancien voisin qui sait utiliser les expressions idiomatiques à bon escient.
Ca y est : je sens en moi l'indescriptible plaisir de reparler la langue de mon enfance, malheureusement délaissée peu à peu au fil des années de ma jeunesse puis de mes préoccupations d'adulte. Une folle envie me titille la mémoire : converser avec : le coiffeur du village, le fermier, li vî Luc, li vî Dinant, èt co avou l' Tol !
Hélas ! Il est trop tard, et tous les regrets sont superflus ! Ces pages-là sont tournées depuis longtemps. Je prends soudain conscience qu'on m'a volé, ou plutôt que j'ai laissé s'envoler, des instants précieux où la communication avait ses véritables fonctions marquées dans la zone intime de langue par le canal auditif.
Je veux aussi revoir des endroits : rues, quartiers, salle de spectacles, sentiers, bois, cimetière,... Je déambule mais à mon appel intérieur, aucun écho vocal ne répond. Je les attendais pourtant les " Tin, quî vla ? On èst rivnu au payi ? Ca fét pléji di rvèy li fi da Filèmon" Seule l'imagination peut donner le change. Et en guise de consolation, je m'attarde devant une vieille porte de grange ou près d'une fontaine, si fidèle par sa présence, et qui semble laisser couler la même eau chantante sur des paroles de mon wallon d'antan.
Ainsi, si des décors n'ont pas changé, les acteurs, eux, se sont retirés les uns après les autres. Je n'ai rien pu faire pour les empêcher de donner l'ultime salut en fin d'acte aux générations suivantes, qui ne se doutaient nullement qu'avec la dernière révérence s'en allait tout un patrimoine langagier ! Il aurait fallu..., on aurait dû..., on aurait pu ! Et je me sens un peu coupable.
Je dois me ressaisir. Me voici devant ma bibliothèque. J'en extrais une ou deux plaquettes. Ce sont des revues en wallon classées depuis des années ! La lecture est hésitante, laborieuse. Mais de page en page, elle devient plus facile. Je lis, relis, redécouvre! Les écrits de mon instituteur rangés comme des reliques intouchables sont une révélation. Je retrouve mon enfance, ma jeunesse. Les voici tous ceux qui n'ont pas cessé de faire battre le coeur wallon dans les mensuels, les gazettes, les publications en prose ou en vers des quatre coins de notre région !
De plus, la chance me conduit à la rencontre d'un écrivain wallon, André Henin, qui devient un ami et avec qui je partage le goût de l'humour, de la dérision, mais aussi celui de la sensibilité poétique sans cesse renouvelée. Il me confiera un jour qu'il avait beaucoup appris grâce aux écrits d'un certain Emile-Joseph Piret dont les images littéraires, les expressions succulentes du terroir ainsi que l'imagination fertile l'avaient particulièrement marqué. Comme le hasard fait parfois les choses dans le sens du courant ! Il s'agissait de mon vieil instituteur du village natal. Je devais, par la suite, le retrouver une fois encore à l'occasion d'un envoi de Danièle Trempont qui eut la délicate attention de me faire parvenir un numéro d' èl Bourdon d'octobre 1985 avec la biographie de mon maître d'école.
quand la terre est réchauffée par un soleil bienfaisant et qu'elle frémit d'impatience, toute prête à recevoir les semailles printanières, on dit que le moment est propice. Hésiter alors ne ferait que compromettre la récolte. La préparation a déjà demandé plus d'un effort ; il est grand temps de passer à l'étape suivante.
Alors, suis-je prêt ? Oserais-je ?
De la lecture à l'écriture
Il faut oser.
En ce qui concerne l'outil, je dois reconnaître qu'il ne m'est pas tout à fait étranger : le maniement de la plume a été certes plus d'une fois éprouvé sur le terrain de la langue française. quant à vouloir récolter sur une terre wallonne !... La difficulté est de taille, j'en suis conscient !
Après avoir confié au papier quelques lignes (en wallon) gardées secrètes, je ressens une incapacité totale à dominer règles phonétiques, morphologiques et syntaxiques ; ce qui est un frein à mes premiers élans fougueux.
Et pourtant l'expression dialectale me monte du cœur aux lèvres, aiguisant un désir irrépressible. C'est pourquoi, insatisfait du dixième jet, je décide de recourir au moyen de communication le plus commode en ce genre de circonstance : l'oral. Car si je me sens incapable d'écrire " correctement " en wallon, et si je pense en wallon, à. l'instant même, je peux me libérer de la crainte paralysante de l'écrit par un stratagème enfantin.
J'ose donc laisser courir mon imagination par l'écrit tel que je le perçois, "en vrac", sous sa forme orthographique, correcte ou incorrecte : tant pis, on verra après. La pensée est bien wallonne - j'insiste - et la transcription écrite est immédiate. Bien entendu, fond et forme seront remaniés comme il se doit. C'est ainsi que quelques poésies et fauves passées au traitement de texte soulagent mon esprit et dissipent la peur de la faute.
J'enregistre alors les productions sur une cassette audio, agrémentées de passages musicaux. Elles seront soumises à Lucien Mahin, un spécialiste écrivain et chercheur en langue wallonne. Il me conforte dans mon audace, malgré mes maladresses. Sa compréhension et son indulgence sont tonifiantes. Je suis aiguillé vers plusieurs éminents chercheurs et écrivains wallons dont Michel Francard, Lucien Somme, Danièle Trmpont, Michèle Gabriel, Louis Baijot, qui, à leur tour, m'encouragent à poursuivre.
Cependant, la joie, le plaisir de créer dans ma langue retrouvée n'annihilent pas mon sentiment d'insatisfaction face à la difficulté scripturale. Il faut maintenant peaufiner les remarques pertinentes, et les orientations de mon premier conseiller me sont d'un grand secours en la matière. De plus, la littérature wallonne est reconsultée, les périodiques sont lus et relus, les dictionnaires régionaux sont compulsés. Il faut confronter, comparer, supprimer, remplacer tout en sauvegardant le potentiel linguistique propre au milieu local (dins l' langâdje di...) ; en un mot, vingt fois sur le métier remettre son ouvrage avec suffisamment de ténacité pour accéder à plus de facilité. Car l'expérience prouve que plus on pense, lit et parle en wallon, plus aisée en sera la transcription. Si ceci n'était une règle élémentaire à retenir pour toute langue, ce serait un truisme. Ce qui ne supprime en rien toutes les difficultés inhérentes aux tournures de phrases à respecter, règles orthographiques (qui se différencient parfois nettement du français) à appliquer, vocabulaire spécifique à utiliser. Remarquons, au passage, que la versification en wallon a également des exigences différentes de celle du français
Conclusion.
La démarche exposée dans ces quelques lignes est-elle la meilleure ?
Je pense qu'elle est profitable en fonction de l'état de latence d'un auteur qui, progressivement, redécouvre une forme d'écriture qui est l'écho d'une pensée et d'un parlé délaissés depuis des années.
Le cheminement décrit ici n'a rien d'original dans la mesure où il se calque sur la méthodologie d'un Célestin Freinet, pédagogue français bien connu de certains enseignants : au départ de l'oral, pratiquer le texte libre, c'est-à-dire libéré, dans un premier temps, des contraintes orthographiques. La phase suivante sera la " toilette du texte " axée tant sur la syntaxe que sur la sémantique. Il s'agit, au début, de dominer le complexe de la faute, de l'erreur, dès l'instant où ce que l'on a à dire compte plus que tout, comme le rappelle judicieusement Emile Sullon (Dji v' va dîre li meune, éditions Dricot, pp.238 et 239).
Une attention soutenue est cependant indispensable, ainsi qu'une exigence justifiée. Les conseils et les encouragements des spécialistes restent nécessaires pour éviter de perdre pied ou se perdre dans les méandres de recherches pénibles ou, au contraire, le confort d'une sotte suffisance.
Ainsi la difficulté acceptée et maîtrisée doit-elle renvoyer à un enthousiasme toujours renouvelé.
Il faut rester modeste dans l'action certes. Mais une langue qui ranime au plus profond de soi doit rester vivante. Elle ouvre les portes et les cœurs aux différentes sous-régions de la Wallonie, avec leurs points communs et leurs diversités spécifiques. A ce titre, elle mérite vraiment les honneurs de tous ceux qui veulent la véhiculer en dépit des aléas de toute espèce à travers les siècles.
Certains affirmeront que, pour cela, il faut être lucide et tenace, à la fois. D'autres diront qu'il faut savoir cultiver l'utopie.
L' avni nos l' apudrè !
Yvon Laurent, divin qué walon po dmwin ?, éd. quorum, 1999.
Les èfants qu' on lome "nén come les ôtes".
Qwè? Pouqwè? Pou quî? Comint?
El fåt sawè.
En årtike del Declaråcion des Drwets d' l' Efant (20/11/59) dit qui l' cia qui n' a nén yeu s' compte a vnant å rnonde, dou costè dou cwâr, dins s' tiesse ou sociålmint, deut yesse trétî, elvè et sognî spéciålmint, chûvant si-n etat ou si situwåcion. Ådjoûrdu co dpu qu' eyîr, on rconut qui l' èfant deut rçuvwêr toutes les protecsions possibes surtout dispû ç' qui s' est passè gn a nén co lontimp et çu qu' on-z ètind raconter tous les djoûs. On pout dire ossi qui pusqu' ene saquî est fwèbe, pusqu' il a dandjî d' aidance.
C' est pou ça qui toutes les djins qu' ont pierdu l' rêzon dispû l' preumî djoû d' leu viye ou a in momint pus tård (maladiye, acsidint), come les cias qu' ont dz ôtès croques, meritnut di yesse rascouvrus dipu qui lz ôtes (Declaråcion d' l' ONU dou 20 di decimbe 1971 et dou 9 di decimbe 1975).
Ça fwait qui les omes di lwè a Beljike, a s' aspouyant su les scrîjâdjes a quession, ont dèdja vlu defini ene politike reyalisse: is ont vôtè come ene seule djin (a l' unanimitè) li Lwè dou 10 di julète 1970 poul bén des èfants et des djonnias eyet djonnètes anormåls (handicapés) di nosse payis. Cit-ci si pout vanter di sn acsion si on rwête des ôtes åtoû d' nouzôtes. Come d' efet, li lwè dit bén qu' i gn a èn acsegnmint spéciål pou les vrés handicapés di 2 ans et dmey a 21 ans (min ça s' pout co d' awè des derogåcions pou les anéyes d' après) qui savnut yesse sicolès min qui n' sårént chûre dins in acsegnmint ordinére.
In côp d' ouy su l' passè.
Did dinltimp, l' èfant qu' aveut deur pou studyî esteut souvint rouvyî padri li stûve, oubén qui l' mwésse li leyeut dwarmi dins l' fond del classe. Il ariveut minme qui yénk ou l' ôte sierveut d' gamin-a-tout-fé dins li scole et s' fieut i [et ainsi faisait-il] toutes les corwéyes pou Mossieu l' Mwésse!
Min gn aveut ossi dz èfants pus maleureus: les må-båtis, les djondus (ou les "maquès", come on djeut biesmint), les rastårdjis a cåze d' ene maladiye. Cetla, on les catcheut a l' måjon ou on les fouteut dins ene måjon d' fôs pou l' restant d' leus djoûs. Li pus tchanceus dimeureut å vîjnâdje. On s' amûzeut d' ses mawes ou d' ses biestriyes: c' esteut "el dimi-doû" ou "l' inocin dou vilâdje"
Dispû l' Antiquitè, ces djins la, " nén come les ôtes " ou " in pô droles " oucobén "qui n' è poulnut rén", ont stî metuwes a pårt. Al Mwayine-Adje, les sots qu' ont vnu insi å monde astént ramechnès dins des places eri d' tout. On les trouveut surtout dins les båtimints des rlidjeus ou des bèguènes. Våt mia s' tére a pinsant ås cias qu' on-z a simplèmint et onteuzmint leyi mori, ou pire, sicafyi (suprimè), adon et co pus tård, paçqu' i n' sièrvént a rén !
Mågré tout, nos fåt rconèche qui l' aidance pou-z èlvè les èfants anormåls est dedja ancyinne a nosse payis. Min on-z aveut pus râde bouchî su l' clå [porté une attention plus particulière] pou les soûrds et les aveules. J.B. Pouplin (in Francès), et J. Henrion (di Vervi) ont sti les anondeus di l' Institut Rweyål pou soûrds-moyas d' Lîdje (1819). Les aveules les rdjondént a 1875, al rûwe Monulfe. In lomè Ovide Decroly (qui fra cåzè d' li après) a metu su pîs èn institut pou lz èfants irréguliers a 1901. Li guere di quatôze a fé drouvi ene sicole pou ôrfèlins qu' estént des "cas sociåls" et des disguèrmèteus ou dispiteus ou margayiveus (caractériels), a 1915. Li Province dou Hènôt drouve ene sicole a 1908 pou les èfants avou des infirmités dou cwâr. Et pourtant, les disrindjîs (les cias qui sont limitès dins leu rézonmint) ont sti lontimp machîs avou les malådes del tiesse. Les fréres et les seurs di Charitè, come les seurs dou Bon Pasteur, ont, di dpu qu' in sièke èrote, bén rçû des èfants soûrds, aveules, disrîndjîs, rèvoltès ou placès på juje.
A pårti d' 1914, la les comunes qui metnut su pî des classes pou les "arièrès". C' est d' ayeur dîj anéyes pus tård qu' i gn a des coûrs pou-z aprinde 65 mésses a-z èlèvè les èfants anormåls", avu, al fén dou scolâdje, in certificat d' aptitude. Pwis, di 1926 a 1966, on veut aparète véci et véla (di Lîdje a Mon, del mer å sûd) des scoles pou les èfants maladieus et lz achèrnåles (paralizès). C' e-st adon qui l' Etat dècide di drouvi des secsions d' acsegnmint spéciål ratatchiyes a des scoles ordinéres. I gn a qu' ådjoûrdu, ces secsions la, co pou ene istwere di liyårds, ont dvu sèrer boutique, et c' est bén damâdje.
Et vo nos rla a cåzer del Liwè dou 6 di djulète 1970. Les minisses Abel Dubwès et Pire Vemeylen ènn ont sti adon les mwaisses-adjinçneus. Des papîs signès pa li Rwè et les djins dou gouviènmint on-st amontè tout èn ètcherpintadje [stucture, organisation] qui les payis vijins sont djalous après.
Nos vnons d' lomer, ciddé padvant, les cias qu' ont poulu profiter di çt assegnmint la. Riwêtons asteure comint ç' qui tout çoula toûne.
L' adjinçnâdje.
I våreut mia dire acsegnmint "spécializé" (come a France) qu' acsegnmint spéciål (amon nozôtes) paçqui c' est bén ene spécializåcion di tout l' sistème d' educåcion. Din l' A.S., i dwèt gn awè des djins assez come professeurs, come docteurs, come infirmîres eyet kinézisses, come sikolokes, aidants sociås èt hay vos nn åroz. On dwèt ossi awè aeurè [programmer] des costindjes [dépenses] pou toutes sôtes d' ostis èt d' èkipmints qui n' egzisnut nén din l' acsegnmint ordinére. Insi, l' A.S. si prèzinte come èn assegnmint qu' a des metodes bén da sène a-z aplikè chûvant les rûjes des scolîs. Come di djusse, on wête d' adiercî s' côp [réussir, viser] pou-z aprestè l' èlève a yesse li pus indèpandant possibe pou poulu viker ami les djins [parmi, au milieu des gens].
Pou dire li vraiy, gn a in clasmint di 8 sôtes d' assegnmint spéciål (nén dire qui dj' a dit qu' i gn aveut qu' yût sôtes d' èfants "nén come les ôtes" !).
Prèmîre sôte: pou les èlèves nén fwårt disrindjîs dins leu tiesse. Ci sôte la n' egzisse nén al pitite sicole [école maternelle].
Deujime sôte: pou les èlèves a mitan diszoûrnyîs [peu perturbés] et / ou les cias fwârt djondus.
Twèjime sôte: pou les cias qu' ont in caractére a pårt, qui n' si savnut mwêstri [maîtriser], c' est zias qui nz avons lomè ènawêre les disguermeteus ou margayiveus (caractériels).
Quatrime sôte: pou les èlèves qu' ont des rastènâdjes ou strupiâdjes dou cwâr [handicap moteur], qu' on lome cobén les malasnès ou mèzalyis.
Cénkime sôte: pou les malådes (classes dins li scole ou dins èn ospitå).
Chîjime sôte: pou les aveules et les cias qui veynut må ou brouyî.
Sètime sôte: pou les soûrds et les cias qu' etindnut deur.
Yûtime sôte: pou les èfants qui n' sont nén disrindjîs min qui machnut les letes ou les mots a lîjant ou a scrîjant; et co pou les cias qui n' savnut cårculer. On les lome des "dis- ... ene saqwè". On n' trouve ci sôte d' acsegnmint spéciål la qui pou les èfants del grande sicole (primaire).
Saquants rilvéyes [quelques remarques]
Ene sicole pout adjinsner ene, deus ou trwès especes d' acsegnmint spéciål. Tènawete di dpu chûvant l' payis.
Dispû seulmint saquants anéyes, on-z a arindjî des classes pou rcîre les otisses. Les otisses, c' est des cias qui n' savnut viker avå les djins paçqu' i n' savnut atôchî [communiquer avec] lz ôtes. Gn a ètou des scoles pou les èfants qu' ont mwintès anormålitès èchone.
Li nombe di scolîs pa classe est cårculè chûvant li sôte d' acsegnmint: ça va di chî sèt djusk' a cåzimint 14.
Dins les anéyes 80 90, si on vout rmete [comparer] li nombe di scolîs eyet scolresses a toute li populåcion des scolîs francofones, les pårts di l' acsegnmint spéciål (A.S.) sont : pitite sicole: 0,45 %; grande sicole: 3,90 %; segondére : 3,96 %.
Li scole pou les pus grands (djusk' a 21 ans) apresse a l' viye avou lz ôtes eyet / ou a in mestî chûvant les capålsitès del tiesse èt dou cwâr. Pou zias, gn a quate fômes d' assegnmint.
Les scoles d' A.S. son-st organizéyes pa l' Francesse Cominålté (dj' ètind bén: l' Etat), min ossi les Provinces, les Comunes èyèt li Libe Acsegnmint.
Bén sûr, toudi chûvant les sôtes di 1 a 8 droci padzeu, et les fômes di rastènâdje [handicap] des èfants, gn a dou personel di mestî qui boute avou zias: des masseu (kinés), des rdresseus d' lingadje [1ogopède], des infirmîs èt infirmîres, des wårdeuses-aclèveuses d' èfants (pwéricultrices), des médcén, des mwésse sipéciåls, des professeurs pou lz atèliés, des aidants sociåls [assistant social], des sikolokes [psychologues], èt tchik èt tchak.
Radjoutons qu' i gn a co ene mwinrnance ["guidance"] qui chût l' èfant ou l' djonnia tout si timp di scole å lon.
Quî ç' qui pout-z intrer din l' Acsegnmint Spéciål èt comint ?
On vént d' vey qu' i gn a des èfants pus "qui-n'-è-poulnut-rén" qui dz ôtes; gn a laddin des malådes èt des rtårdjis. Les parints, qu' ene sifaite rascråwe lèzî arive, on lzî dmande di prèzinter leu-n èfant a èn egzamin P.M.S. (psycho-médico-social ). Pou l' evoyî dins les sôtes d' acsegnmint 5, 6 ou 7, c' e-st in médcén spécialisse qui s' enn ocupe.
Avou les concluzions des P.M.S.-îs [responsables PMS] su l' papî, les parints n' ont pus qu' a tchwezi li scole qui convént l' mia a l' èfant. Min pa côps, i sèron-st oblidjis d' è prinde yène a sacants kilomètes del måjon (gn a nén des scoles d' A.S. tot avå !) et minme di mète l' èfant dins èn internat, yénk qui l' ahåye [lui convient], rapôrt a ses rûjes.
Intrer, min ossi zè vûdî quand gn a moyin !
Li Consey di Classe (mwésses, professeurs et Mwinrnance) si met an dvwêr di mostrer li tchmwin å scolî, et dire si-n avis ètou s' i fåt in candjmint d' vôye: èn ôte espéce d' assegnmint, ene ôte classe, quékfiye minme li ralâdje èviè ene sicole ordinére,
Gn a des Comissions di Consultåcion qu' arindjnut les bidons quand gn a des arokes qu' aspitnut [des problèmes qui surgissent] inte les parints et li scole pou s' i fåreut candji l' èlève d' ètåblichmint ou di sôte d' acsegnmint, oucobén pou-z awè ene dèrogåcion (âdje d' intréye ou d' vûdâdje).
Pou-z avni a qwè ?
Avou ene sicolance (ene pèdagojiye) bén adièrciye pou chake èfant, in personel rindu après sn ovrâdje, qui cache sins rlaye après les rmédes, des ostis et des sûrs moyins, branmint d' èlèves arivnut insi a-z e sôrti avou oneur. Gn a des cias qu' ont poulu rmuchî dins les classes ordinéres; gn a dz ôtes qu' ont arivè a gangnî li certificåt d' ètudes come tertous ou l' papî pou in mestî. Les pus djondus del tiesse (qui n' sont nén fwârt malins), ont stî apontyîs [préparés] li mia possibe pou l' vicâdje dins in "Çante di djoû" ou ene "Måjon d' ocupåcion" [foyer d'occupation] ou bén pou travayî dins èn atèlié protéjé.
On-z a co fét des sayes d' assegnmint spéciål ordinére (Enseignement intégré), avou l' èlève a mitan-timp dins ene sicole et a mitan-timp dins l' ôte, come pou des aveules, des soûrds, des strupyis, et vos nn åroz. On pout dire qui ces espéryinces la n' ont nén fét berwète.
Tout comptè tout rabatu, li såme (but') di l' A.S., c' est qui li scolî ou li scolresse riprinde confyince a li-minme. C' est d' lî fé awè ene boune coudûjance (condwite), èy èl fé rèyussi.
Dins ene sôcièté qu' est toudi dpus malåjîte a continter, fåt dire qui les pus flåwes (les pus fwèbes), les pus må-båtis, les mwinse subtis [malins] ont l' dreut, come les ôtes, d' awè leu place pou viker, minme si, pou des cias qu' i gn a, el passâdje a yeu sti trop coûrt.
Ivon LORINT ancyin inspecteur di l' Acsegnmint spéciål, sicrît pou: Li Ranteule.
A l' oral, l'auteur prononce générallement å comme au (maujon, paurt, i faut, i vaut, ospitau, malaujîte), mais aussi â, surtout dans les emprunts récents au français (spéciâl, anormâl, liyârd, dèclarâcion).
Pitite istwere di si vicåreye.
Brève notice biographique.
Yvon LAURENT (Romedenne, le 17.01.1934): 3e d'une famille de 5 enfants.
Enfance, adolescence et jeunesse à Romedenne.
1940: exode en France, dans les Pyrénées orientales.
Humanités à l'Athénée Royal de Florennes. Service militaire en Allemagne.
1955: éducateur interne à l'Athénée Royal de Dinant.
1957: mariage avec Jeannine Vidick (Hastière). Instituteur: Jury central.
1959: instituteur à l'Ecole Moyenne de l'Etat à Wellin. Certificats pour l'enseignement spécial et cours normaux de perfectionnement pédagogique à l'Institut supérieur de pédagogie à Namur. Instituteur pour l'enseignement spécial à Wellin.
1977: inspecteur pour l'enseignement spécial fondamental.
1991: retraité et domicilié à Musson.(Deux petits-enfants)
Auteur de nombreux articles psychopédagogiques dans des revues pédagogiques et d'articles éducatifs publiés dans LE SOIR (plusieurs "Cartes blanches"). Coauteur d'ouvrages traitant de problèmes particuliers de pédagogie (enseignement. spécial).
Poésies publiées dans la revue "L'Arche d'Ouvèze- Lettre de Poésie" (Vaison-la-Romaine) et dans "Traversées" (Virton). Ouvrage paru: Les Quanta du Prisme (poèmes) Edit. La Centaine, Bruxelles-Vaison (1998). Article dans "Voies et voix de la Poésie" (Rencontres internationales de poésie (avril 1994), à Vaison. Lu à la Maison de la Poésie de Namur à l'occasion de la Nuit de la Poésie, le 6.10.1995. De même à la rencontre et récital de poésie, le 25.04.98 en Drôme provençale. Lauréat du concours de la Communauté française "Votre alphabet: 26 mots en liberté" (1995).
Auteur-compositeur: chansons pour enfants et pièces liturgiques à 4 voix (inédites). Choriste (baryton) dans plusieurs chorales.
Peintre (figuratif et non-figuratif): plusieurs expositions d'huiles et aquarelles. Influencé par la technique de J. Schuddenboom, et conseillé par L. Maringer et Ch. Delaite.
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